Flexi-jobs : menace de niveau 4 dans le secteur Horeca!

La loi concernant les nouvelles mesures Horeca a été publiée le 26 novembre 2015. Depuis le 1er décembre, il est possible de conclure un flexi-job chez un employeur de l’Horeca.

Qu’est-ce qu’un flexi-job ?

Sous le statut du flexi-job, le travailleur ne reçoit plus un salaire lié au barème mais une indemnité (« flexi-salaire ») de minimum 8,82 €/h. Pour le travailleur, il n’y a aucune retenue sociale ou fiscale. Il touche donc le brut en net. L’employeur ne verse qu’une cotisation spéciale de 25%.

 

Quelle est la condition ?

A condition d’avoir travaillé au minimum à 4/5ème temps chez un autre employeur, un travailleur  peut exercer un flexi-job chez un employeur Horeca en flexi-job. Le travailleur ne peut donc pas exercer un flexi-job et un travail régulier chez le même employeur. La condition du 4/5ème est vérifiée sur le troisième trimestre précédent l’occupation en flexi-job.

Il n’y a aucune limite au nombre d’heures que le travailleur peut prester en flexi-job (dans la limite de la durée normale du travail).

 

Le contrat de travail

Le travailleur flexi-job et l’employeur doivent conclure un contrat cadre qui prévoit d’avoir recours à des occupations en flexi-job. Chaque fois que le travailleur exerce un flexi-job, un contrat de travail doit être conclu. Ce contrat de travail ne doit pas nécessairement être écrit.

 

Et quel est le problème ?

Les flexi-jobs ont été présentés comme une possibilité d’une occupation complémentaire dans l’horeca pour les travailleurs qui ont déjà un emploi régulier qui leur assure leurs droits en sécurité sociale. Dans ce contexte le « travail d’appoint » n’est pas taxé, le travailleur touche son brut en net.

L’idée paraît séduisante à première vue, mais elle cache une véritable menace pour le travail régulier dans le secteur Horeca dans un premier temps, et pour l’ensemble des secteurs à terme.

Nous vous présentons ci-dessous point par point les dangers de cette mesure.

Menace sur l’emploi régulier

Vous pensez qu’un flexi-job se limite à 1/5ème ? Absolument pas, et là réside un problème fondamental : la condition du 4/5ème n’est pas vérifiée au moment de l’occupation en flexi-job mais au troisième trimestre précédent. Prenons un exemple concret : un travailleur temps plein perd son emploi et s’inscrit au chômage. Dès le lendemain, il peut travailler comme flexi-job pendant maximum trois trimestres chez un autre employeur horeca. Quand on connaît la propension de certains employeurs horeca à contourner la loi, il ne leur faudra pas longtemps avant d’organiser des systèmes exploitant cette énorme faille.

L’employeur peut diminuer drastiquement ses frais de personnel en remplaçant une partie des travailleurs réguliers par une réserve de flexi-jobs.

Dans les entreprises qui comptent plusieurs établissements, il est même tout à fait possible de contourner la condition selon laquelle un travailleur régulier ne peut pas travailler en flexi-job chez le même employeur. En effet, la définition de l’employeur pour vérifier cette condition est le numéro d’onss. Il est tout à fait envisageable que le patron de plusieurs établissements enregistre chacun d’eux avec un numéro d’onss différent. Dès lors, il peut faire tourner ses travailleurs d’un établissement à l’autre par exemple trois mois en régulier suivi de trois mois en flexi-job. Il peut également compléter cette équipe en ayant recours à des travailleurs externes flexi-jobs via une agence intérim. Inutile de faire un dessin sur la menace que cela constitue pour les travailleurs réguliers !

 

Contrats zéro-heures

On introduit de manière totalement légale les fameux « contrats zéro-heures » qui ont défrayé la chronique notamment en Angleterre.

Le travailleur n’a plus aucune sécurité d’emploi. Il ne sait pas s’il va travailler d’un jour à l’autre. Le travailleur risque aussi d’être lié dans les faits à un employeur. Celui-ci peut lui proposer à n’importe quel moment un contrat flexi-job. Si le travailleur refuse, l’employeur ne fera plus appel à lui. Et avec des horaires qui changent constamment, sans procédure d’affichage et sans être repris au règlement de travail, il est pratiquement impossible de chercher un autre emploi. Ce qui pour les temps partiels, suite à la nouvelle réglementation, peut mener à une suppression de l’allocation complémentaire de garantie de revenu.

De plus, du point de vue strictement juridique, le contrat cadre n’est pas réglementé par le droit du travail. N’importe quelle clause valable en droit civil peut être prévue. L’employeur pourrait ainsi envisager d’exiger un dédommagement si le travailleur ne se présente pas lorsqu’il lui propose un contrat flexi-job.

 

Menace sur le droit du travail

L’introduction du système des flexi-jobs remet en question tout le droit du travail. Le travailleur gagne un « flexi-salaire » qui est exclu de la notion de rémunération pour l’ONSS. La classification des fonctions, les barèmes sectoriels minimums et l’ancienneté ne sont pas non plus d’application. L’indemnité flexi-job est de 8,82 €/h, alors que le salaire minimum absolu du secteur horeca est de 11,24 €/h. Le salaire minimum d’un garçon/serveuse de café avec 5 ans d’ancienneté est de 13,16€/h ! Et quant aux horaires, ceux-ci peuvent varier sans aucune obligation d’affichage ni de mention dans le règlement de travail.

C’est également une exception dangereuse au principe du contrat de travail écrit, et aux limites des contrats de travail successifs à durée déterminée.

Et sans trace écrite, comment le travailleur va-t-il pouvoir prouver que l’employeur l’a engagé ?

 

Menace sur la sécurité sociale

Le travailleur touche le brut pour le net. L’employeur ne verse qu’une cotisation spéciale de 25%. Ce qui signifie un manque à gagner très important pour la sécurité sociale. Et ce seront les autres travailleurs qui devront cotiser davantage pour combler le déficit, à moins de diminuer encore les prestations de sécurité sociale.

 

Menace pour les autres secteurs

Au mieux, la mesure est discriminatoire. Pourquoi un système avantageux au niveau fiscal et social n’est-il réservé qu’exclusivement au secteur Horeca. Pourquoi d’autres secteurs intensifs en main d’œuvre comme la construction ou le nettoyage n’y auraient-ils pas droit ?

Nous craignons cependant que cela ne se limite pas là. L’horeca est une expérience, un laboratoire. Certains membres du gouvernement ne cachent pas leur volonté d’étendre ce système aux autres secteurs. Ce qui mettrait vraiment la sécurité sociale et l’emploi régulier en péril pour l’ensemble de ces secteurs.

Lutter contre le travail au noir ou légaliser le travail au noir ?

Rappelons quand même qu’à l’origine, le système a été présenté dans le cadre de la lutte contre le travail au noir. Mais en réalité, il ne s’agit pas de lutter contre celui-ci mais de le légaliser ! Les travailleurs en seront victime tôt ou tard …

Que fait FGTB Horval pour défendre les travailleurs ?

Les syndicats ont décidé de tenter tous les recours juridiques afin de contester la loi sur les flexi-jobs. En premier lieu, on envisage un recours en annulation devant la Cour constitutionnelle.

Les syndicats du secteur Horeca continuent à considérer ces flexi-jobs comme étant une menace pour l’emploi régulier.